Curieux, vous ne trouvez pas ? J'ai deux petits enfants de 21 ans qui connaissent presque par cœur les blagues que racontait un certain Marius Colucci. Pourtant, ils ne l'ont pas connu notre Coluche national. Est-ce sa notoriété qui a défié le temps ? Je ne crois pas. C'est tout simplement la pertinence et l'acuité avec lesquelles il a observé et dépeint les travers de notre pays, de ses habitants et de ses hommes et femmes politiques qui restent d'actualité. Aujourd'hui, rien n'a changé, rien n'a évolué sinon dans le mauvais sens, on est dans la surenchère. Les riches sont toujours plus riches et les pauvres toujours plus pauvres, mieux, les classes moyennes qui avaient encore le bonheur de "naviguer" entre les deux extrêmes, sont en passe de rejoindre les plus pauvres. La preuve, et c'est une constat et non une assertion gratuite, les Restos du Cœur que Coluche avait lancés sur une boutade le 26 septembre 1985 sur Europe 1, accueillent chaque année de plus en plus de "bénéficiaires", nom que l'on attribue par compassion aux pauvres qui viennent avec la honte chevillée au corps chercher de quoi survivre.
Je le dis encore ici, il y a de la déchéance dans notre Nation, la déchéance d'une population de plus en plus paupérisée au profit d'une poignée de dirigeants tant financiers que politiques avec la bénédiction voire l'aide d'une élite politique censée nous représenter à tous. Qu'il s'agisse de droite comme de gauche (enfin ceux qui s'en réclament mais n'en ont que le vernis rouge), quels sont les gouvernants qui ont pris les vraies mesure pour que l'œuvre de Coluche ne soit, comme il le souhaitait, qu'un coup médiatique éphémère ? La réponse est vite trouvée : aucun. Les uns au nom du sacro-saint libéralisme, les autres au nom de la crainte de voir s'évader les capitaux à l'étranger, tous privilégiant l'argent à l'humain, ont laissé se dégrader une situation connue et reconnue mais qui, ne les touchant pas, leur apparaît comme bénigne, presque insignifiante. Il n'est qu'à voir les réactions que j'ai eues et publiées lorsque l'hiver 2009 j'ai écrit aux députés et sénateurs pour leur demander de faire appliquer la résolution, inscrite en tête de mon blog, qu'avait prise notre président occasionnel en 2006.
On se marrerait certainement beaucoup si cet observateur privilégié de notre société n'avait disparu tragiquement et dans des circonstances assez douteuses le 19 juin 1986, quelques semaines après sa première et unique campagne des Restos. Peut-être aurait-il, durant ces 25 années infléchi certaines décisions prises par l'état pour qu'elles soient moins ridicules et surtout moins liberticides. C'est facile de supputer sur ce qu'aurait pu dire ou faire une personne décédée, me direz-vous, mais il était assez prévisible pour qu'aujourd'hui on imagine des réactions violentes à l'égard du barreur qui mène notre bateau ivre.
Que l'on soit révolté pour les grossièretés qu'il se permettait mais qui n'étaient jamais vulgaires ou que l'on apprécie la causticité de ses sketches, il ne laissait pas indifférent et même un grand nombre de ceux qui le détestaient reviennent aujourd'hui sur leur jugement. Il avait avant tout le tort d'avoir raison avant les autres.
25 ans que notre ami a disparu, autant de temps qu'il nous manque, autant d'années où l'on entend dans la rue :
-" Ah si Coluche était là !!!"
Eh bien oui, il est parti, putain de camion comme le dit Renaud, il est au panthéon des hommes de bien, de ceux qui n'ont jamais oublié que la misère fut leur lot et voulaient l'éradiquer de ce pays que l'on dit si beau au travers du monde, mais que quelques hommes de mauvaise volonté sont en passe de transformer en poubelle sociale avec l'aval d'une frange de la population abrutie par le ronronnement lénifiant d'une poignée de médias plus axée sur sa survie que sur celle du peuple qui les nourrit.
Combien tu dois rigoler tout la haut sur ton nuage, à moins que la pluie qui parfois nous inonde ne soit faite des larmes que tu verses en voyant la misère dans laquelle nous plongent les petits soldats qui se prennent pour des glands (pardon, des grands).
Tchao pantin !!!